DES FEMMES QUI TOMBENT
Pierre Desproges
À Cerillac, le docteur Rouchon boit, l’épicier Boucharoux cancane, le boucher Labesse fait des lieux communs, et Catherine, la femme du docteur, élève tant bien que mal son enfant handicapé. Il suffit d’ajouter le meurtre d’Adeline Serpillon dans ce tableau rural et de le saupoudrer d’une nuée de moustiques pour obtenir le premier – et injustement le seul – roman de Pierre Desproges, une histoire singulière qui commence comme un polar de campagne et qui se termine dans un délire science-fictionnesque unique en son genre. Les mots sont rares, les dialogues ciselés, et la poésie surréelle qui s’échappe de ces femmes qui tombent, oscillant entre un Audiard sous acide et un Vian en verve, n’en finit pas de nous faire regretter l’absence définitive d’autres romans dans la bibliographie de Desproges. –David Rault
Après avoir lu ce livre, mon éditeur, ma sœur et ma femme me demandent pourquoi l’aubergiste Gilberte a la tête enfermée dans un sac en plastique, au moment où son corps pendu est découvert dans le cellier. Je réponds que je n’en sais rien. Peut-être s’agit-il d’un ultime geste de coquetterie assez compréhensible de la part d’une femme qu’on devine accorte mais pudique et qui aurait jugé inconvenant de montrer une langue pendante au premier découvreur de cadavre venu ? Mais peut-être pas. C’est un mystère. Il faut parfois laisser traîner des mystères à la sortie des livres.
Aux derniers chants de l’Odyssée, qui célèbre le retour à Ithaque, l’auteur n’évite-t-il pas, et avec quelle délicatesse, de s’étendre sur la surprise d’Ulysse décelant une odeur d’after-shave au fond du lit conjugal enfin retrouvé ?
Editions Seuil – 1996
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